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Participation du public : illégalité de l'arrêté pris sans considération des observations du public (Conseil d'Etat)

Par une décision n°424600 du 12 juillet 2019, le Conseil d'Etat a annulé un arrêté de suspension de la chasse de certains gibiers au motif que cette décision a été adoptée sans prise en considération de l'ensemble des commentaires exprimés par le public au cours de la procédure préalable de consultation publique.

Dans cette affaire, la Fédération nationale des chasseurs avait formé devant le Conseil d'Etat pour demander l'annulation de l'arrêté du 1er août 2018 du ministre chargé de l'écologie, relatif à la suspension de la chasse de certaines espèces de gibier en France métropolitaine.

Pour mémoire, cet arrêté constitue une "décision susceptible d'avoir une incidence sur l'environnement" et doit, à ce titre, être précédé d'une procédure de participation du public (article L. 123-19-1 du code de l'environnement)

Cette procédure, pour être régulière, doit respecter plusieurs exigences.

Un délai de quatre jours doit ainsi être respecté entre la date de fin de consultation publique et la date de signature de la décision concernée. Ce délai doit permettre :

- une prise en considération des observations et

- la réalisation d'une synthèse écrite des observations du public consulté.

Ce délai de quatre jours peut être réduit ou n'être pas respecté en cas d'urgence.

Au cas présent, le Conseil d'Etat relève tout d'abord que ce delai de quatre jours n'a pas été observé entre la fin de la consultation publique et l'adoption de la décision litigieuse. Celle-ci n'a pas davantage été précédée d'un tel travail de synthèse des observations recueillies :

"4. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que la consultation du public, organisée en application de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement, sur le projet d'arrêté suspendant la chasse de la barge à queue noire et du coulis cendré jusqu'au 30 juillet 2019 a été ouverte entre le 10 et le 31 juillet 2018 et que l'arrêté attaqué a été signé dès le 1er août 2018, sans qu'ait alors été rédigée la synthèse des 7 780 commentaires validés reçus pendant la consultation."

L'absence de respect de ce délai de quatre jours et de réalisation de cette synthèse des observations constitue un vice de procédure. Sauf si le ministre en charge de cette consultation démontre que l'urgence s'opposait à ce qu'une telle synthèse soit réalisée. Or, dans le cas d'espèce, le ministre chargé de l'écologie n'a' pas démontré qu'une telle urgence existait :

"5. Si le ministre invoque en défense l'urgence qui s'attachait à la signature de l'arrêté en raison de l'imminence de la réouverture de la chasse pour les espèces en cause, qui devenait possible le 4 août 2018 en l'absence d'arrêté, il ne fait valoir aucune circonstance objective, indépendamment du retard qui lui est imputable dans la préparation de l'arrêté, qui aurait justifié de déroger aux dispositions précédemment citées du code de l'environnement."

En conséquence : l'arrêté est illégal :

"6. En signant l'arrêté attaqué dès le lendemain du jour de la clôture de la consultation du public, sans respecter le délai minimum de quatre jours fixé par l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement et sans qu'ait été établie la synthèse des observations et propositions recueillies lors de la consultation, l'auteur de l'arrêté ne peut être regardé comme ayant pris en considération l'ensemble des commentaires exprimés par le public. Par suite, et alors même que le ministre fait valoir qu'il aurait analysé pendant la consultation les avis exprimés au fur et à mesure de leur réception et indique qu'une synthèse provisoire des 1 000 premières observations aurait été établie, la fédération requérante est fondée à soutenir que l'arrêté qu'elle attaque a été pris au terme d'une procédure irrégulière. Cette irrégularité, qui a privé les personnes ayant participé à la consultation de la garantie de voir leur avis dûment pris en considération à l'égard d'une décision ayant une incidence directe et significative sur l'environnement, entache d'illégalité la décision prise le 1er août 2018."

En définitive, l'arrêté attaqué est donc annulé pour vice de procédure.

Paradoxalement, alors même que la décision ainsi annulée suspendait la chasse de certaines espèces et qu'elle a donc été, pour ce motif, vivement critiquée par des écologistes, cette décision du Conseil d'Etat contribue au progrès du droit de l'environnement en ce qu'elle oblige le ministère chargé de l'écologie :

- soit à réaliser systématique une synthèse des observations ;

- soit à rapporter la preuve d'une urgence s'opposant à ce travail de synthèse.

Il s'agit cependant d'un progrès très mesuré. En effet, la prise en considération des observations du public est réduite à un simple formalisme : le respect d'un délai et la réalisation d'une synthèse. 

Arnaud Gossement

Avocat associé - Cabinet Gossement Avocats 

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