Proposition 1 : Augmenter la longévité des produits et réduire la pollution Résumé de la proposition. Cette proposition propose, à partir de 2021, de généraliser l'éco-conception avec plus de « transparence » et le contrôle du respect des normes :
- En augmentant la longévité des produits et réduire la pollution : incorporation de matières recyclées avec la fixation de taux évolutifs de matières recyclées par secteur de produits, prolongation de la durée de garantie des produits (5-10 ans), interdiction de concevoir des produits non-recyclables ;
- En incitant les entreprises à une plus grande sobriété dans leurs modes de production et de fonctionnement: créer des doubles circuits d'eaux usagées, réduction des défauts de fabrication, garantir une seconde vie aux pièces défectueuses, révision des circuits de déplacement, réduction de tous les emballages et suppression des échantillons individuels.
Notre analyse. I. Certaines de ces propositions viennent compléter ou renforcer des dispositions qui figurent dans la loi n°2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et pour l'économie circulaire. C'est notamment le cas :
- De l'incorporation de matières recyclées dans les produits : La loi du 10 février 2020 prévoit les consommateurs sont informés sur l'incorporation de matières recyclées, avec l'indication, le cas échéant, du pourcentage de matières recyclées effectivement incorporées (cf. article L. 541-9 du code de l'environnement). La loi prévoit également que les biens acquis par les personnes publiques intègrent des matières recyclées (cf. articles 58 et 55 de la loi).
Mais les mesures les plus effectives figurent dans les dispositions consacrées à la responsabilité élargie du producteur (REP). La loi du 10 février 2020 prévoit notamment que le barème d'éco-modulation prend en compte la performance environnementale des produits (notamment l'incorporation de matières recyclées ou a contrario, la présence de matières limitant la recyclabilité des produits – cf. article L. 541-10-3 du code de l'environnement).
En outre, les producteurs soumis à la REP sont tenus d'élaborer un plan de prévention et d'éco-conception dans le but d'accroître la recyclabilité des produits et l'incorporation des matières recyclées (cf. article L. 541-10-12).
Les producteurs de produits visés par une filière de REP sont par conséquents incités, y compris financièrement, à améliorer la performance environnementale de leurs produits. La proposition de fixer un taux d'incorporation de matières recyclées présente l'inconvénient du contrôle et corrélativement, de la sanction en cas de violation. Par ailleurs, il conviendrait d'examiner la conformité de cette mesure au droit de l'Union européenne, au regard notamment de la libre circulation des produits.
- La prolongation de la garantie légale : La loi du 10 février 2020 a étendu de six mois la garantie légale lorsque le produit est réparé. Dans le cas où un vendeur remplace le produit au lieu de le réparer, la garantie légale est renouvelée (cf. article L. 217-9 du code de la consommation).
La proposition vise donc à prolonger pour une durée plus longue (5 à 10 ans) la durée de la garantie.
II. La conformité de certaines propositions, en particulier au droit de l'Union européenne, pourrait ne pas être assurée : c'est notamment le cas de l'interdiction de concevoir des produits non recyclables. Au demeurant, une telle interdiction devrait être discutée et adoptée au niveau européen et non uniquement national.
Proposition n°2 : Faire respecter la loi sur l'interdiction de l'obsolescence programmée
Pour mémoire, la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique a défini l'obsolescence programmée (cf. article L. 441-2 du code de la consommation) et l'a assortie de sanction (cf. article L. 454-6).
Cette proposition est trop générale, en particulier, elle ne précise pas les moyens qui seraient susceptibles d'être mises en œuvre pour en garantir le respect. Il aurait pu être intéressant, par exemple, de proposer d'assouplir le critère de l'intention « délibérée » de réduire la durée de vie du produit, qui est prévu à l'article L. 441-2.
Proposition n°3 : Rendre obligatoire la possibilité de réparation des produits manufacturés qui sont vendus en France, la disponibilité des pièces détachées d'origine pendant une durée définie. Mettre en place et à proximité des filières et ateliers de réparation, et rendre accessibles les services après-vente.
Résumé : cette proposition prévoit de rendre obligatoire la possibilité de réparation des produits, d'obliger les producteurs à fournir des pièces détachées d'origine pendant 15 ans, mettre en place des ateliers et filières de réparation.
Notre analyse : La loi du 10 février 2020 prévoit plusieurs mesures en faveur de la réparation et/ou du réemploi. En particulier, la loi prévoit la création d'un fonds dédiés à la réparation et un autre dédié au réemploi, qui seront financés par les éco-organismes (cf. article L. 541-10-4 et 5 du code de l'environnement). Le fonds dédié à la réparation devrait permettre la mise en place, à l'échelle du territoire, d'un réseau de réparateur labellisé. Par ailleurs, la loi interdit à un metteur sur le marché l'utilisation de techniques visant à rendre impossible la réparation de ses produits en dehors de ses circuits agréés (cf. article L. 441-3 du code de la consommation).
Proposition n°4 : Rendre obligatoire le recyclage de tous les objets en plastique dès 2023, supprimer tous les plastiques à usage unique dès 2023 et développer le recyclage des autres matières
Résumé : Cette proposition est particulièrement développée et contient de nombreuses mesures. Il est notamment proposé de soutenir les innovations visant le développement du recyclage, d'édicter, d'ici 2022, des normes sur la qualité des matières des produits issus du recyclage dont le respect sera assuré par un organisme public. Le rapport propose de fixer des objectifs sur la qualité des métaux recyclés dans le recyclage des véhicules d'ici 2021 ainsi que de normaliser les conditions d'extraction et les « standards » de ces métaux d'ici 2022. Il propose, en outre, d'étendre la REP à tous les produits de grande consommation, recyclables ou nécessitant de créer une filière de recyclage. Il propose également de fixer un objectif de recyclage de 65 % des déchets et résidus industriels d'ici 2023-2025 au plus tard et d'assurer que 90 % des revenus de la TGAP soit consacré à la prévention et à l'amélioration des réseaux de tri sélectif et au recyclage.
Notre analyse. En ce qui concerne le recyclage des produits en plastique et l'interdiction des produits en plastique à usage unique, le cadre juridique contient déjà plusieurs dispositions. En particulier, il convient de relever que la loi du 10 février 2020 a étendu la liste des produits en plastique à usage unique dont il est mis fin à la disposition (cf. article L. 541-10-15 du code de l'environnement). Certes, la proposition est plus ambitieuse puisqu'elle propose de mettre fin à la mise à disposition de tous les produits en plastique à usage unique.
De plus, la loi du 10 février 2020 a fixé un objectif de "100 % de plastique recyclé d'ici le 1er janvier 2025" défini à l'article L. 541-1 du code de l'environnement. La proposition pourrait ainsi s'articuler avec cet objectif – qui n'est pas contraignant -. L'effectivité de cette proposition reste largement tributaire de la capacité de la filière à recycler 100 % des produits en plastique et celle des établissements publics de coopération intercommunale compétentes en matière de gestion des déchets à organiser et financer un tri rigoureux des produits en plastique.
En ce qui concerne l'extension de la REP, la loi du 10 février 2020 a d'ores-et-déjà significativement étendu le nombre de filières de REP. En l'occurrence, les nouvelles filières qui sont créées concernent des produits de grande consommation (par exemple, jouets, activités de loisirs et de sport, lingettes, cigarettes, etc.)
Par ailleurs, sur la proposition de recycler 65 % des déchets et résidus « industriels », il convient d'une part, de définir précisément ce que recouvrent les « déchets et résidus industriels » - par rapport aux déchets d'activités économiques - et d'autre part, d'articuler cet objectif avec ceux qui sont fixés dans les cahiers des charges encadrant l'activité des éco-organismes.
Proposition n°5 : Durcir et appliquer la réglementation sur les déchets d'activités économiques, les déchets ménagers non dangereux et les déchets non dangereux inertes
Résumé. La proposition prévoit qu'en 2021, les pouvoirs publics établissent des objectifs quantitatifs pour le recyclage et la réutilisation de matériaux, sur le fondement d'une réglementation qui précise le taux de matière recyclée incorporée dans le produit mis sur le marché. Il est proposé, en outre, d'interdire la destruction des produits non-vendus ainsi que l'exportation de déchets à partir de 2025, de mettre en place un mécanisme de contrôle sur l'application de la directive DEEE (en imposant de déclarer les exportations de déchets). Le rapport précise que le « groupe souhaite aller plus loin que ce qui est prévu par la loi du 10 février 2020 ».
Notre analyse. Comme cela a été précisé supra, les cahiers des charges encadrant l'activité des éco-organismes, fixent des taux de recyclage qui doivent être atteints par ces derniers au cours de leur période d'agrément.
Sur la proposition d'interdire de détruire les invendus, la loi du 10 février 2020 prévoit d'imposer aux producteurs de réemployer, de réutiliser ou de recycler leurs invendus non alimentaires, dans le respect de la hiérarchie des modes de traitement (cf. article L. 541-10-15 du code de l'environnement).
Enfin, il convient d'examiner la conformité de la proposition d'interdire l'exportation des déchets avec le droit de l'Union européenne, plus particulièrement avec les dispositions du règlement 1013/2006 du 14 juin 2006 sur les transferts transfrontaliers de déchet.
Sur la proposition de déclarer les exportations de déchets, une telle mesure a été adoptée aux termes de la loi du 10 février 2020. En effet, l'article 62 de la loi impose aux éco-organismes, lorsque les déchets dont ils ont la charge, quittent le territoire national pendant tout ou partie des étapes jusqu'au traitement final, de déclarer auprès du ministre chargé de l'environnement, la quantité et la destination des déchets exportés (cf. article L. 541-10-6 du code de l'environnement).