Le projet de loi « Engagement dans la vie locale et proximité de l'action publique » a été modifié par un amendement n° 1457 pour étendre la règle de l'antériorité prévue à l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation aux activités touristiques, culturelles et sportives.

Selon certains, cet amendement pourrait interdire aux personnes habitant à proximité d'établissements festifs de se plaindre des nuisances sonores si ceux-ci existaient déjà avant leur emménagement.

Le droit est plus nuancé.

Pour rappel, l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation instaure un droit du premier occupant selon lequel :

"Les dommages causés aux occupants d'un bâtiment par des nuisances dues à des activités agricoles, industrielles, artisanales, commerciales ou aéronautiques, n'entraînent pas droit à réparation lorsque le permis de construire afférent au bâtiment exposé à ces nuisances a été demandé ou l'acte authentique constatant l'aliénation ou la prise de bail établi postérieurement à l'existence des activités les occasionnant dès lors que ces activités s'exercent en conformité avec les dispositions législatives ou réglementaires en vigueur et qu'elles se sont poursuivies dans les mêmes conditions."

Les victimes de nuisances (sonores, visuelles, olfactives) causées par certaines activités ne peuvent pas en demander réparation s'ils se sont installés après le commencement de ces activités et surtout si ces activités se poursuivent en conformité avec la réglementation et dans les mêmes conditions.

Le champ d'application de cet article est limité par les activités énumérées : agricoles, industrielles, artisanales, commerciales ou aéronautiques. L'amendement permettrait d'élargir le bénéfice de la règle de l'antériorité aux activités touristiques, culturelles et sportives.

Malgré cet éventuel élargissement du champ d'application de l'article L. 112-16 du code de la construction, le voisinage victime de nuisances ne serait pas démuni et pourrait toujours se « plaindre ».

Tout d'abord, une victime de nuisances peut obtenir réparation lorsque l'activité qui cause des nuisances ne respecte pas la réglementation ou lorsque ces conditions d'exploitation ont été modifiées.

Ensuite, lorsque l'activité est située dans une copropriété, les copropriétaires peuvent obtenir réparation sur le seul fondement du règlement de copropriété, sans que l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation ne leur soit opposable (cf. C.A. Chambéry, 24 oct. 1994, S.C.I. P., Juris-Data n° 053104).

Enfin, lorsque la nuisance est sonore, les voisins pourront toujours déposer plainte pour tapage nocturne (article R. 623-2 du code pénal). Le bruiteur encourt alors une peine de 450 euros. 

Emilie Bertaina

Avocate – Cabinet Gossement Avocats