Par une décision du 17 janvier 2018, le Conseil d'Etat a transmis au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité de l'article L. 561-1 du code de l'environnement avec la Constitution, dans la mesure où cet article ne prévoit pas expressément dans son champ d'application les risques liés à l'érosion côtière.

Créé par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, l'article L. 561-1 du code de l'environnement prévoit la possibilité d'exproprier des biens exposés à des risques naturels menaçant gravement des vies humaines.

A l'origine, ce texte s'appliquait dans des cas très limitatifs de risque prévisible de mouvements de terrain, d'avalanches ou de crues torrentielles. Son champ d'application a été étendu successivement aux risques d'affaissement de terrains dus à une cavité souterraine, puis à ceux dus aux « crues torrentielles ou à montée rapide ou de submersion marine ».

Depuis quelques dizaines d'années, l'érosion du littoral cause de nombreux dommages aux infrastructures et bâtiments. Des matériaux constituant la côte sont transportés vers la mer sous l'effet des ondes et des précipitations. Le trait de côte recule provoquant parfois des risques d'effondrement.

C'est ce que subit manifestement le requérant dans la présente affaire, un Syndicat de copropriétaires d'un immeuble situé à Soulac-sur-Mer.

En l'espèce, face au risque d'effondrement de cet immeuble consécutivement à un phénomène d'érosion côtière le Syndicat de copropriétaires a demandé au Préfet de la Gironde d'engager la procédure d'expropriation prévue par l'article L. 561-1 du code de l'environnement, ce qu'il a refusé. Le requérant a alors saisi le Tribunal administratif de Bordeaux puis la Cour administrative d'appel de Bordeaux qui ont tous deux rejeté sa demande.

Le requérant a alors formé un pourvoi tendant à l'annulation de l'arrêt n° 14BX03289 rendu par la Cour administrative d'appel de Bordeaux le 9 février 2016 et a sollicité l'examen par le Conseil constitutionnel des dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'environnement. En effet, il prétend que ces dispositions, si elles devaient être interprétées comme excluant de leur champ d'application les risques liés à l'érosion côtière, méconnaitraient le principe d'égalité devant la loi et le droit de propriété ainsi que le principe de prévention garanti par l'article 3 de la Charte de l'environnement.

Il appartiendra donc au Conseil constitutionnel de déterminer si la liste des risques naturels prévues par les dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'environnement est exhaustive et, le cas échéant de se prononcer sur leur conformité au regard de la Constitution.

Toutefois, si l'article L. 561-1 du code de l'environnement venait à être abrogé, la procédure d'expropriation qu'il prévoit ne pourrait pas s'appliquer au présent litige. La décision devrait être rendue dans les prochains mois. 

Emilie Bertaina

Collaboratrice - Cabinet Gossement Avocats