Ce vendredi 8 janvier 2021, le Gouvernement a adressé le projet de loi "portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets" aux membres du Conseil national de la transition écologique. Le texte et son exposé des motifs peuvent être consultés ici. Il traduit certaines propositions de la Convention citoyenne pour le climat et s'articule en cinq titres pour 62 articles. Analyse.

 NB : Article actualisé le 8 février 2021. Le présent article, rédigé par toute l''équipe du cabinet, procède donc d'un examen du texte du projet de loi tel que transmis ce 8 janvier 2021 au Conseil national de la transition écologique.

I. Commentaire général

Sur le plan politique, les commentaires se concentreront sans doute sur le point de savoir si les dispositions du projet de loi correspondent ou non aux propositions de la Convention citoyenne pour le climat. Toutefois, cette comparaison est délicate. D'une part, toutes les propositions de la Convention ne sont pas d'ordre législatif. D'autre part, pour celles qui relèvent de la loi, le Gouvernement ne pouvait pas partir d'une page blanche mais devait tenir compte du droit existant et des compétences confiées à d'autres autorités publiques : institutions internationales, Union européenne, collectivités territoriales. Autorités qui ne sont pas engagées par les propositions de la Convention. Enfin, certaines propositions de la Convention étaient assez imprécises sur le plan du droit comme le comité légistique a pu parfois le souligner. Reste qu'il est probable que ce projet de loi décevra celles et ceux qui étaient attachés à une "reprise sans filtre" des propositions de la Convention. Certaines mesures ont en effet été écartées comme celle relative à l'obligation de rénovation énergétique et d'autres ont été rédigées, soit avec moins d'ambition que souhaitée, soit avec des échéances de mise en œuvre lointaines. Reste que si cette loi ne traduit pas sans filtre les propositions de la Convention citoyenne, elle demeure une base de discussion intéressante pour les parlementaires qui voudront l'amender.

Sur le plan juridique, notre analyse est que la priorité est de dégager les moyens pour appliquer et faire respecter l'ensemble des règles du droit de l'environnement qui ont d'ores et déjà adoptées. Sous cette réserve, ce projet de loi appelle les observations générales suivantes.

En premier lieu, sur la forme, il faut rendre gré au Gouvernement de n'avoir pas cédé à la facilité consistant à rédiger une loi d'orientation qui aurait comporté nombre d'objectifs et de mesures apparemment spectaculaires mais en réalité dépourvus de valeur juridique. Si ce projet de loi comporte quelques dispositions symboliques et dépourvues de portée normative, elles ne sont pas si nombreuses. Reste que ce projet de loi comporte encore trop de mesures "de proscratination", ce qui en affaiblit la qualité. Il s'agit d'objectifs et de mesures dont l'entrée en vigueur est annoncée mais remise à (beaucoup) plus tard. Dans certains cas, il est justifié que le législateur laisse un délai suffisant aux acteurs concernés par une nouvelle mesure pour s'organiser. Dans d'autres cas, la définition d'une échéance lointaine réduit l'intérêt de la mesure dés l'instant où les circonstances de fait et de droit auront pu considérablement évoluer d'ici à cette date. Il faut cependant avoir présent à l'esprit que ces échéances lointaines sont souvent le moyen pour le ministère de l'écologie d'arracher des arbitrages en interministériel.

Il appartiendra aux parlementaires de décider s'ils souhaitent ou non avancer la date d'entrée en vigueur des mesures suivantes :

- article 11 : "Un objectif de 20 % de la surface de vente consacrée à la vente en vrac est fixé au 1er janvier 2030 dans les commerces de vente au détail dont la surface est supérieure à 400 m2."

- article 12 : "L'obligation de mise en place d'une consigne pour les emballages en verre, de manière à ce qu'ils soient lavables et réutilisables, pourra notamment être généralisée à partir de 2025. »

- article 23 : L'obligation de végétaliser ou de solariser les bâtiments de plus de 500 mètres carrés entre en vigueur au 1er janvier 2024.

- article 28 : "2° A compter du 1er janvier 2030, la fin de la vente des voitures particulières neuves émettant plus de 95 gCO2/km NEDC soit 123 gCO2/km WLTP, à l'exception des véhicules destinés à des usages spécifiques lorsque leurs caractéristiques le nécessitent et dont le volume ne pourra excéder 5 % de l'ensemble des ventes annuelles de voitures particulières neuves ;"

- article 30 : "A partir de la loi de finances initiale pour 2023, le Gouvernement présente au Parlement une trajectoire de suppression en 2030 du dispositif de remboursement partiel de la taxe intérieure de consommation des produits énergétiques relative au gazole prévu à l'article 265 septies du code des douanes."

- Article 41 : interdiction de la location de passoires thermiques à compter du 1er janvier 2028.

- Article 57 : extension à partir de 2025 à la restauration collective privée de l'obligation tenant à ce que les produits acquis dans ce cadre au moins 50 % de produits durables et de qualité dont au moins 20 % de produits issus de l'agriculture biologique.

A noter : un article ne fait état d'aucune date précise pour son entrée en vigueur. Il s'agit alors d'une mesure uniquement symbolique dépourvue de portée normative (neutron législatif). Il s'agit de l'article 34 : invitation du Gouvernement à agir au niveau européen pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du transport aérien et clause de revoyure lorsque le trafic retrouvera son niveau de 2019.

En deuxième lieu et sur le fond, cette loi n'est pas une loi de révolutions mais, pour l'essentiel, une loi de précisions de dispositifs existants et, souvent, récemment adoptés. Ces précisions sont, pour plusieurs d'entre elles, intéressantes même si elles ne contribuent pas à la stabilité du droit. A titre d'exemple, voici quels sont les articles de ce projet de loi qui prévoient une modification de loi adoptées pourtant très récemment :

- modification de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous : article 56 (expérimentation du menu végétarien dans les cantines scolaires).

- modification de la loi n°2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l'énergie et au climat : article 39 (audit énergétique) ; article 41 (location des passoires thermiques).

- modification de la loi n°2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités : article 28 (interdiction des voitures polluantes en 2030)

- modification de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (AGEC) : article 1er (empreinte carbone des produits); article 9 ("Oui Pub") ; article 13 (pièces détachées)

Notons que ces précisions sont parfois minimes.

Ainsi, l'article 56 du projet de loi modifie le champ d'une expérimentation qui existe déjà pour proposer des menus végétariens dans la restauration collective publique. Dans sa rédaction actuelle issue de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous", l'article L. 230-5-6 du code rural et de la pêche maritime dispose : "A titre expérimental, au plus tard un an après la promulgation de la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, pour une durée de deux ans, les gestionnaires, publics ou privés, des services de restauration collective scolaire sont tenus de proposer, au moins une fois par semaine, un menu végétarien. Ce menu peut être composé de protéines animales ou végétales. L'expérimentation fait l'objet d'une évaluation, notamment de son impact sur le gaspillage alimentaire, sur les taux de fréquentation et sur le coût des repas, dont les résultats sont transmis au Parlement au plus tard six mois avant son terme". L'article 56 précité propose de modifier cet article, principalement pour que ce menu végétarien soit proposé chaque jour et non plus chaque semaine.

En troisième lieu, si certaines mesures retiendront plus que d'autres l'attention de la presse et du grand public, il n'en demeure pas moins que les blocs de dispositions les plus importants sont, à notre sens, ceux qui ont trait

  • à l'économie circulaire : le paradoxe tient ici à ce que la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire" est très récente (loi n° 2020-105 du 10 février 2020).
  • à l'artificialisation des sols. Paradoxalement, alors que l'objectif premier de ce projet de loi est d'enrichir le droit afférent à la lutte contre le changement climatique, il est possible que le droit et le code de l'urbanisme soit fortement sollicité au cours des débats parlementaires. En outre, le projet de loi prévoit une habitation du Gouvernement à adopter des mesures destinées à lutter contre l'étalement urbain.
  • à l'articulation du dialogue social et du dialogue environnemental : nous vous proposons sur ce point un article spécifique à ces dispositions du projet de loi

II. Classement des mesures

De manière à permettre à chacun de se faire sa propre opinion sur la portée et l'intérêt de ce projet de loi, nous vous proposons un classement de ses mesures en fonction de leur capacité à modifier l'état du droit existant. Une même mesure peut être classée dans plusieurs catégories

Les mesures les plus importantes

Il s'agit des mesures qui créeront des changements du droit allant au delà de simples précisions de dispositifs existants

Article 5 : publicité : "contrat climat" conclu entre les médias et les annonceurs et le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) afin de réduire la publicité pour les produits polluants

Article 15 : commande publique : obligation pour les acheteurs publics de prendre en compte les considérations liées aux aspects environnementaux des travaux, services ou fournitures achetées.

Article 20 : habilitation du Gouvernement à réformer le code minier par voie d'ordonnance

Article 31 : Création d'une écotaxe par les régions : habilitation à légiférer par ordonnance pour permettre la mise en place, par les régions disposant d'un domaine public routier et qui le souhaitent, d'une contribution spécifique assise sur le transport routier de marchandises.

Article 47 : intégration de l'objectif de réduction par deux de l'artificialisation des sols dans les documents d'aménagement et d'urbanisme.

Article 52 : étude de potentiel de réversibilité du bâtiment par le maître d'ouvrage, adossée au diagnostic déchets dans les cas de démolition.

Article 62 : obligation du recours à un label pour les entreprises se revendiquant du commerce équitable.

Article 63 : création du délit général de pollution des eaux, du sol et de l'air, inséré dans un nouveau titre au sein du livre II du code de l'environnement relatif aux atteintes générales aux milieux physiques. ("délit d'écocide").

Les mesures "médiatiques"

Ces mesures sont classées ici en raison de leur plus grande capacité à retenir l'attention et à susciter des débats publics.

Article 1er : ("Eco-score") amélioration de l'information du consommateur sur l'empreinte carbone des produits

Article 4 : interdiction de la publicité pour les énergies fossiles en raison de leur impact direct sur le changement climatique

Article 28 : interdiction des véhicules thermiques - objectif d'avoir une part de véhicules émettant plus de 95 gCO2/km NEDC dans les ventes de voitures particulières neuves inférieure à 5% % au 1er janvier 2030

Article 31 : Création d'une écotaxe par les régions : habilitation à légiférer par ordonnance pour permettre la mise en place, par les régions disposant d'un domaine public routier et qui le souhaitent, d'une contribution spécifique assise sur le transport routier de marchandises.

Article 41 : interdiction de la location de passoires thermiques à compter de 2028.

Article 45 : interdiction des terrasses chauffées

Article 50 : (mesure "Amazon") principe général d'interdiction de création de nouvelles surfaces commerciales qui entraîneraient une artificialisation des sols.

Article 54 : inscription dans la loi des objectifs de la stratégie nationale pour les aires protégées 2020-2030 fixés par le Président de la République, à savoir constituer un réseau d'aires protégées couvrant 30 % du territoire national.

Article 56 : expérimentation pendant deux ans, dans les collectivités locales volontaires du choix quotidien d'un menu végétarien dans les services de restauration collective

Article 62 : obligation du recours à un label pour les entreprises se revendiquant du commerce équitable

Article 63 : création du délit général de pollution des eaux, du sol et de l'air, inséré dans un nouveau titre au sein du livre II du code de l'environnement relatif aux atteintes générales aux milieux physiques. ("délit d'écocide")

Les mesures d'expérimentation

Le projet de loi comporte prévoit plusieurs expérimentations

- Article 1 : expérimentation de 5 ans pour définir la méthodologie de l'affichage carbone des produits

- Article 9 : expérimentation de 36 mois de l'interdiction de la distribution à domicile d'imprimés papiers ou cartonnés non adressés

- Article 26 : expérimentation des voies réservées aux véhicules moins polluants sur le réseau routier

- Article 56 : expérimentation du menu végétarien pendant deux ans

III. Le plan détaillé du projet de loi

Le projet de loi comporte les 5 titres suivants qui correspondent aux 5 blocs de propositions de la Convention citoyenne pour le climat

  • Titre Ier : Consommer.
  • Titre II : Produire et travailler
  • Titre III : Se déplacer
  • Titre IV : Se loger
  • Titre V : Se nourrir

Dans le détail, le projet de loi comporte, pour l'instant, les 62 articles suivants.

TITRE Ier : Consommer

CHAPITRE Ier : Informer, former et sensibiliser

Article 1er : amélioration de l'information du consommateur sur l'empreinte carbone des produits

Article 2 : affirmation du rôle fondamental et continu de l'éducation au développement durable, du primaire jusqu'au lycée

Article 3 : élargissement des missions du comité d'éducation à la santé et à la citoyenneté au développement durable

CHAPITRE II : Encadrer et réguler la publicité

Article 4 : interdiction de la publicité pour les énergies fossiles en raison de leur impact direct sur le changement climatique

Article 5 : "contrat climat" conclu entre les médias et les annonceurs et le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) afin de réduire la publicité pour les produits polluants

Article 6 : décentralisation du pouvoir de police de la publicité, qui sera désormais exercé par le maire, que la commune dispose ou non d'un règlement local de publicité

Article 7 : compétence des collectivités pour encadrer, dans leur règlement local de publicité, la publicité et les enseignes situées à l'intérieur des vitrines ou des baies d'un local commercial

Article 8 : interdiction des avions publicitaires

Article 9 : expérimentation du "Oui pub" : interdiction de la distribution à domicile d'imprimés papiers ou cartonnés non adressés lorsque l'autorisation de les recevoir n'est pas expressément affichée sur la boîte aux lettres

Article 10 : interdiction de la distribution d'échantillons de produits sans consentement clairement exprimé du consommateur

CHAPITRE III Accélérer le développement de la vente en vrac et de la consigne du verre

Article 11 : objectif de 20 % de surfaces de ventes consacrées à la vente en vrac d'ici 2030 dans les grandes et moyennes surfaces (commerces de plus de 400m² de vente)

Article 12 : mise en place de dispositifs de consigne pour les emballages en verre, de manière à ce qu'ils soient lavables et réutilisables

TITRE II Produire et travailler

CHAPITRE Ier Verdir l'économie

Article 13 : extension de la liste des catégories de produits pour lesquelles les producteurs doivent tenir les pièces détachées disponibles dans un délai minimal.

Article 14 : nécessité de cohérence entre la stratégie nationale bas carbone et la stratégie nationale de recherche

Article 15 : obligation pour les acheteurs publics de prendre en compte les considérations liées aux aspects environnementaux des travaux, services ou fournitures achetées.

CHAPITRE II Adapter l'emploi à la transition écologique

Article 16 : intégration du sujet de la transition écologique parmi les attributions du comité social et économique

Article 17 : nomination par le préfet au comité régional de l'emploi, de la formation et de l'orientation professionnelle (CREFOP), de deux représentants compétents en matière de transition écologique.

Article 18 : confie aux opérateurs de compétences (OPCO) la mission d'information et de soutien aux PME et aux branches professionnelles, sur les enjeux liés à l'environnement et au développement durable

CHAPITRE III Protéger les écosystèmes et la biodiversité

Article 19 : Consécration dans la loi sur l'eau de l'importance de la préservation et la restauration des milieux naturels qui découlent directement des processus naturels du grand cycle de l'eau et des interactions entre eux

Article 20 : habilitation du Gouvernement à réformer le code minier par voie d'ordonnance

CHAPITRE IV : Favoriser des énergies renouvelables pour tous et par tous

Article 21 : déclinaison de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) par des objectifs régionaux de développement des énergies renouvelables

Article 22 : inscription du développement des communautés d'énergies renouvelables parmi les volets que doit traiter la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE).

Article 23 : extension de l'obligation prévue à l'article L. 111-18-1 du code de l'urbanisme d'installer des systèmes de production d'énergie renouvelable ou des toitures végétalisées sur les surfaces commerciales et les entrepôts en abaissant le seuil de 1 000 m² à 500 m²

TITRE III : Se déplacer

CHAPITRE Ier : Promouvoir les alternatives à la voiture individuelle et la transition vers un parc de véhicules plus propres

Article 24 : favoriser le report modal de la voiture vers les transports collectifs en entrée de ville par le développement des parkings-relais et possibilité pour le maire de réserver certaines places de stationnement pour les usagers des transports en commun

Article 25 : extension de l'obligation de mise en place des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) aux agglomérations métropolitaines de plus 150 000 habitants d'ici le 31 décembre 2024

Article 26 : expérimentation pour 3 ans la mise en place de voies réservées à certaines catégories de véhicules (transports collectifs, covoiturage, véhicules à très faibles émissions)

Article 27 : objectif d'obliger les Régions à fixer des tarifs de TER attractifs

Article 28 : objectif d'avoir une part de véhicules émettant plus de 95 gCO2/km NEDC dans les ventes de voitures particulières neuves inférieure à 5% % au 1er janvier 2030

CHAPITRE II : Optimiser le transport routier de marchandises et réduire ses émissions

Article 29 : enseignement à l'éco-conduite dans le cadre des formations professionnelles initiale et continue des conducteurs de transport routier.

Article 30 : suppression progressive de l'avantage fiscal sur la TICPE entre 2023 et 2030.

Article 31 : Création d'une écotaxe par les régions : habilitation à légiférer par ordonnance pour permettre la mise en place, par les régions disposant d'un domaine public routier et qui le souhaitent, d'une contribution spécifique assise sur le transport routier de marchandises.

Article 32 : généralisation de l'obligation de prendre en compte les postes significatifs d'émissions générées du fait de l'activité des entreprises « chargeurs »

CHAPITRE III Agir au niveau local avec les entreprises et les administrations pour organiser mieux les déplacements

Article 33 : intégration d'habitants tirés au sort dans les comités des partenaires mis en place par les autorités organisatrices de la mobilité, aux côtés de représentants des associations d'usagers

CHAPITRE IV Limiter les émissions du transport aérien et favoriser l'intermodalité train/avion

Article 34 : invitation du Gouvernement à agir au niveau européen pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du transport aérien et clause de revoyure lorsque le trafic retrouvera son niveau de 2019

Article 35 : interdiction de l'exploitation de services aériens sur des liaisons intérieures au territoire national, dès lors qu'un trajet alternatif, par un autre moyen de transport collectif, moins émetteur de CO2, existe en moins de 2h30.

Article 36 : encadrement du développement des capacités aéroportuaires

Article 37 : obligation pour tous les opérateurs aériens d'organiser la compensation carbone des émissions des vols intérieurs métropolitains, ainsi que sur une base volontaire pour les vols depuis et vers l'outre-mer. Début de mise en application dès 2022 et compensation de 100 % des émissions en 2024.

TITRE IV Se loger

CHAPITRE Ier Rénover les bâtiments

Article 38 : assise législative pour les étiquettes du diagnostic de performance énergétique (DPE)

Article 39 : création d'un audit énergétique pour les maisons individuelles et immeubles en monopropriété classés F ou G faisant l'objet d'une mutation ou d'une mise en location. Diagnostic de performance énergétique obligatoire pour les bâtiments de logements collectifs.

Article 40 : interdiction lors du renouvellement d'un bail ou de la remise en location, d'augmenter le loyer des logements F et G ("passoires thermiques")

Article 41 : interdiction de la location de passoires thermiques à compter du 1er janvier 2028.

Article 42 : clarification de l'organisation du service public de la performance énergétique de l'habitat

Article 43 : création du plan pluriannuel de travaux et aux provisions correspondantes dans le fonds de travaux de la copropriété pour les immeubles en copropriété

CHAPITRE II Diminuer la consommation d'énergie

Article 45 : interdiction des terrasses chauffées

CHAPITRE III Lutter contre l'artificialisation des sols en adaptant les règles d'urbanisme

Article 46 : définition de la notion d'artificialisation, objectif de réduction par deux du rythme d'artificialisation sur les dix prochaines années par rapport à la décennie précédente.

Article 47 : intégration de l'objectif de réduction par deux de l'artificialisation des sols dans les documents d'aménagement et d'urbanisme

Article 48 : production d'un rapport annuel par chaque commune ou intercommunalité rendant compte de l'artificialisation des sols et donnant lieu à un débat devant le conseil municipal ou l'assemblée délibérante.

Article 49 : obligation de déterminer une densité minimale pour les grands projets d'aménagement mis en œuvre dans le cadre du dispositif de grandes opérations d'urbanisme (GOU)

Article 50 : principe général d'interdiction de création de nouvelles surfaces commerciales qui entraîneraient une artificialisation des sols.

Article 51 : zones d'activités économiques : actualisation au minimum tous les 6 ans de leur inventaire par les intercommunalités, transmission aux autorités compétentes en matière d'urbanisme et de programmation de l'habitat, pouvoirs du préfet et des autorités compétentes pour imposer des travaux d'office aux propriétaires dans les ZAE situées dans le périmètre d'un projet partenarial d'aménagement (PPA) ou d'une opération de revitalisation du territoire (ORT), pour la réhabilitation des locaux vacants ; participation des personnes publiques à ces associations foncières

Article 52 : étude de potentiel de réversibilité du bâtiment par le maître d'ouvrage, adossée au diagnostic déchets dans les cas de démolition.

Article 53 : habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour limiter l'étalement urbain.

CHAPITRE IV Lutter contre l'artificialisation des sols pour la protection des écosystèmes

Article 54 : inscription dans la loi des objectifs de la stratégie nationale pour les aires protégées 2020-2030 fixés par le Président de la République, à savoir constituer un réseau d'aires protégées couvrant 30 % du territoire national.

Article 55 : redonne aux titulaires du droit de préemption dans les espaces naturels sensibles la capacité d'exercer ce droit dans les périmètres sensibles créés par l'Etat

TITRE V Se nourrir

CHAPITRE IER Soutenir une alimentation saine et durable peu émettrice de gaz à effet de serre pour tous

Article 56 : expérimentation pendant deux ans, dans les collectivités locales volontaires du choix quotidien d'un menu végétarien dans les services de restauration collective

Article 57 : extension à partir de 2025 à la restauration collective privée de l'obligation tenant à ce que les produits acquis dans ce cadre comportent au moins 50 % de produits durables et de qualité dont au moins 20 % de produits issus de l'agriculture biologique.

Article 58 : ajout au plan national de l'alimentation et de la nutrition (PNAN) d'une dimension climatique.

CHAPITRE II : Développer l'agroécologie

Article 59 : mise en place d'une trajectoire de réduction des émissions liées à l'utilisation des engrais azotés, complété par la mise en place (sous conditions) d'une taxe à partir de 2024

Article 60 : stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée (SNDI) : création d'un mécanisme d'alerte à destination des entreprises lorsqu'elles importent depuis des zones déforestées.

Article 61 : impose la compatibilité des objectifs du futur plan stratégique national, prévu par la réglementation européenne réformant la politique agricole commune (PAC) et élaboré par l'Etat en lien avec les Régions, avec les stratégies nationales en matière d'environnement.

Article 62 : obligation du recours à un label pour les entreprises se revendiquant du commerce équitable

Article 63 : création du délit général de pollution des eaux, du sol et de l'air, inséré dans un nouveau titre au sein du livre II du code de l'environnement relatif aux atteintes générales aux milieux physiques. ("délit d'écocide")

IV. Focus sur certaines dispositions du projet de loi

Article 4 : interdiction de la publicité pour les énergies fossiles en raison de leur impact direct sur le changement climatique

La publicité est un des sujets phare de ce projet de loi. L'exposé des motifs confirme l'objectif de « diminuer les incitations à la consommation en régulant le secteur de la publicité.' Le projet de loi "vise ainsi à modérer l'exposition des Français à la publicité et interdit la publicité pour les énergies fossiles qui sont directement responsables du changement climatique. » Dès lors, le chapitre 2 « Encadrer et réguler la publicité » du titre Ier de la loi traite « des mesures pour limiter les incitations à la consommation, notamment à travers une régulation de la publicité. »

L'article 4 du projet de loi crée une nouvelle section au sein du chapitre Ier sur les publicités, enseignes et préenseignes du titre VIII du livre V du code de l'environnement intitulée «Publicité sur les produits et services ayant un impact sur le climat excessif ». Pour les auteurs de l'exposé des motifs de la loi, l'article 4 comporte une nouveauté importante : « à l'instar de la loi Evin, il vient inscrire dans le droit le principe qu'il ne sera plus possible de faire de la publicité pour les énergies fossiles en raison de leur impact direct sur le changement climatique. »

En premier lieu, l'article 4 du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets prévoit d'introduire l'article L. 581-25-1 dans le code de l'environnement venant ainsi entériner l'interdiction de la publicité en faveur des énergies fossiles. Cette interdiction sera effective un an après l'entrée en vigueur de la loi. Il est précisé qu'un décret en Conseil d'Etat établira une liste des énergies fossiles concernées par cette interdiction et les modalités s'appliquant aux énergies renouvelables incorporées avec dans des énergies fossiles. Toujours dans le but de favoriser l'information du consommateur, l'article précise que ce décret devra prendre en considération l'information relative au prix des énergies, ainsi que des obligations légales ou règlementaires qui s'imposent aux fournisseurs et distributeurs de ces énergies.

En deuxième lieu, l'article 4 introduit également l'article L. 581-35-1 dans le code de l'environnement. Cet article prévoit une sanction pénale en cas de non-respect de cette interdiction de publicité. En effet, la diffusion d'une publicité en faveur des énergies fossiles sera punie d'une amende de 30.000 € pour une personne physique et de 75.000 € pour une personne morale. En cas de récidive, le montant des amendes prévues peut être porté au double.

En dernier lieu, la régulation de la publicité devient un levier dans la lutte contre le changement climatique. En effet, la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (JORF n°0035 du 11 février 2020) était déjà venue renforcer la lutte contre la publicité incitant à la production de déchets. Ainsi, elle avait introduit à l'article L.541-15-9 du code de l'environnement l'interdiction de toute publicité ou action de communication commerciale incitant à dégrader des produits en état normal de fonctionnement et à empêcher leur réemploi ou réutilisation.

Article 5 : "contrat climat" conclu entre les médias et les annonceurs et le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) afin de réduire la publicité pour les produits polluants

L'article 5 du projet de loi propose de recourir à des « codes de bonnes conduite » afin de réduire la publicité relative aux produits ayant un impact négatif sur l'environnement. Cet article ajoute le paragraphe suivant à l'article 14 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication :

« Le Conseil supérieur de l'audiovisuel promeut en outre la conclusion de codes de bonne conduite visant à réduire efficacement les communications commerciales audiovisuelles relatives à des produits ayant un impact négatif sur l'environnement, notamment au regard de leur empreinte carbone, des émissions de gaz à effet de serre qu'ils génèrent et de leur participation à la déforestation. Ces codes visent notamment à prévenir des communications commerciales audiovisuelles présentant favorablement l'impact environnemental de ces produits. Le Conseil rend compte dans son rapport annuel de l'application des codes de bonne conduite adoptés. »

Deux éléments ressortent de cette nouvelle disposition.

  • D'une part, il est proposé que le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) promeut les codes de bonnes conduites afin de réduire les communications commerciales audiovisuelles portant sur des produits ayant des conséquences négatives sur l'environnement. Selon l'exposé des motifs du projet, ces codes devraient être passés entre le Conseil supérieur de l'audiovisuel ainsi que les médias et annonceurs. Ils constitueraient des engagements volontaires. Par ailleurs, la notion « d'impact négatif de l'environnement » devrait prendre en compte l'empreinte carbone, les émissions de gaz à effet de serre et la participation à la déforestation des produits commercialisés.
  • D'autre part, c'est à l'aide du rapport annuel du CSA que l'application des codes de bonnes conduites serait suivie. L'exposé des motifs précise que cette disposition consacre le « principe de co-régulation » dans la mesure où le CSA serait garant du respect des engagements des filières.

Article 6 : décentralisation du pouvoir de police de la publicité, qui sera désormais exercé par le maire, que la commune dispose ou non d'un règlement local de publicité

Dans le cadre du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, l'article 6 propose de modifier le chapitre 1er intitulé « Publicité, enseignes et préenseignes » du titre VIII du livre V du code de l'environnement. Au préalable, il convient de rappeler qu'actuellement, le pouvoir de police de la publicité est confié, à titre principal, au préfet et, à titre subsidiaire, au maire « s'il existe un règlement local de publicité ».

En premier lieu, il est proposé de modifier les articles L. 581-6, L. 581-9, L. 581-18 et L. 581-21 du code de l'environnement afin que les déclarations préalables et autorisations requises en matière de publicité soient désormais délivrées par le maire (et non plus par le préfet).

En deuxième lieu, l'article L. 581-14-2 du même code serait modifié comme suit : « Les compétences en matière de police de la publicité sont exercées par le [maire]. [Toutefois, ces compétences peuvent être transférées au président de l'établissement public de coopération intercommunale dans les conditions et selon les modalités prévues à l'article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales.] » Dès lors, cet article aurait pour effet de transférer la compétence en matière de police de la publicité au maire au nom de la commune.

En troisième lieu, il est proposé de modifier les articles L. 581-27, L. 581-28 et L. 581-29 du code de l'environnement afin de permettre au maire d'engager une procédure de sanction administrative :

  • « Dès la constatation d'une publicité, d'une enseigne ou d'une préenseigne irrégulière » au regard de la réglementation applicable (article L. 581-27) ;
  • Dans le cas où la déclaration préalable « fait apparaitre que le dispositif déclaré n'est pas conforme aux dispositions législatives et réglementaires » (article L. 581-28) ;
  • « Dès constatation d'une publicité irrégulière au regard des dispositions des articles L. 581-4, L. 581-5 ou L. 581-24 » (article L. 581-29).

A cet égard, l'article L. 581-26 du même code serait également modifié afin de permettre au maire de pouvoir prononcer une amende d'un montant de 1 500 euros à l'encontre de « la personne qui a apposé ou fait apposer un dispositif ou matériel visé à l'article L. 581-6, sans déclaration préalable ou non conforme à cette déclaration ».

En dernier lieu, il est proposé d'ajouter un alinéa à l'article L. 5211-9-2 du code général des collectivités territoriales, rédigé comme suit : « Par dérogation à l'article L. 581-14-2 du code de l'environnement, lorsqu'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre est compétent en matière de plan local d'urbanisme ou de règlement local de publicité, les maires des communes membres de celui-ci transfèrent au président de cet établissement leurs prérogatives en matière de police de la publicité. »

Ainsi, l'article 6 prévoit de conférer le pouvoir de police de la publicité au maire et ce, que la commune dispose ou non d'un règlement local de publicité. Selon l'exposé des motifs de la loi, ce transfert du pouvoir de police de la publicité au maire se justifie par le fait que ce dernier soit « proche du terrain et des citoyens » donc « plus à même de produire et faire respecter des règlementations adaptées à son territoire et à ses réalités ».

Article 11 : objectif de 20 % de surfaces de ventes consacrées à la vente en vrac d'ici 2030 dans les grandes et moyennes surfaces (commerces de plus de 400m² de vente)

L'article 11 du projet de loi fixe un objectif à compter du 1er janvier 2030, de 20 % des surfaces dédiées à la vente en vrac dans les commerces de vente au détail dont la surface est supérieure à 400 m2. Les modalités permettant d'atteindre cet objectif devront être précisées par décret, lequel définira des objectifs plus précis pour « certains secteurs et produits ».

Cet objectif s'inscrit dans celui, plus général, de limiter la production de déchets d'emballages en plastique et de produits en plastique à usage unique, poursuivi notamment par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique et pour une croissante verte, la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, la loi du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et pour l'économie circulaire ainsi que par la directive 2019/904 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 relative à la réduction de l'incidence de certains produits en plastique sur l'environnement.

On notera qu'un projet de décret, en consultation sur le site internet du ministère de la Transition écologique jusqu'au 12 janvier prochain, prévoit de réduire de 20 % les emballages plastiques à usage unique d'ici 2025 et de tendre vers une réduction de 100 % d'ici 2025 des emballages plastiques à usage unique « inutiles ».

Article 12 : mise en place de dispositifs de consigne pour les emballages en verre, de manière à ce qu'ils soient lavables et réutilisables

L'article 12 du projet de loi prévoit qu'à partir de 2025, l'obligation de mettre en place une consigne pour les emballages en verre, de manière à ce qu'ils soient lavables et réutilisables, « pourra » être généralisée. Il est prévu d'intégrer cette disposition au II de l'article L. 541-10-11 du code de l'environnement. Cet article, issu de l'article 66 de la loi n°2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et pour l'économie circulaire (dite AGEC), prévoit que les producteurs ou les éco-organismes dont ces derniers relèvent, peuvent être tenus de mettre en place un ou plusieurs dispositifs de consignes afin d'atteindre objectifs nationaux ou européens de prévention ou de gestion des déchets. La loi conditionne toutefois la mise en place de ces consignes à leur « bilan environnemental positif ».

La mise en place d'une consigne en vue d'accroître le réemploi des déchets n'est pas une nouveauté. Un dispositif similaire a également été prévu, s'agissant des bouteilles en plastique, à l'article 66 de la loi AGEC. Cet article prévoit en effet que le Gouvernement peut, en concertation avec les parties prenantes, de mettre en place un ou plusieurs dispositifs de consigne pour recyclage et réemploi pour les bouteilles en plastique, en cas de non atteinte des cibles de performance fixées par la loi (en l'occurrence, 90% des bouteilles en plastique collectées pour recyclage en 2029).

Article 15 : obligation pour les acheteurs publics de prendre en compte les considérations liées aux aspects environnementaux des travaux, services ou fournitures achetées.

A la lecture de l'exposé des motifs, l'article 15 du projet de loi "portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets" impose aux acheteurs publics de "prendre en compte les considérations liées aux aspects environnementaux des travaux, services ou fournitures achetées". Cette disposition qui s'inspire d'une proposition de la Convention citoyenne pour le climat, s'inscrit plus généralement dans la tendance actuelle à "verdir" la commande publique.

L'article 15 du projet de loi susvisé s'inspire de la proposition PT7.1 de la Convention citoyenne visant à "renforcer les clauses environnementales dans les marchés publics", qui avait déjà fait l'objet d'une analyse. Pour mémoire, deux mesures étaient proposées par le Groupe de Travail « Produire et Travailler » :

  • Rendre les clauses environnementales obligatoires dans les marchés publics ;
  • Mettre en avant la valeur écologique des offres avec la notion « d'offre écologiquement la plus avantageuse ». L'idée étant de "montrer que l'offre valorisée sur les marchés publics est la plus viable écologiquement et pas la plus intéressante économiquement".

Ainsi, la Convention citoyenne pour le climat préconisait une plus grande prise en compte de l'environnement d'une part, dans les marchés publics et d'autre part, dans les procédures d'appel d'offres. La proposition comportait également des recommandations – difficilement applicables – telles que donner au critère environnemental un poids d'au moins 20 % de la note dans les cahiers des charges des appels d'offres ou introduire un « facteur kilomètres » favorisant les offres induisant moins de déplacements quel que soit l'objet du marché.

L'article 15 du projet de loi propose une rédaction moins ambitieuse, qui devrait faciliter sa mise en œuvre. Il prévoit de modifier deux dispositions du code de la commande publique, portant respectivement sur les règles générales applicables aux marchés publics et sur les procédures d'appels d'offres.

En premier lieu, l'article 15 du projet de loi ajoute un nouvel alinéa à l'article L. 2112-2 du code de la commande publique, relatif aux conditions d'exécution d'un marché :

« Les clauses du marché prennent en compte des considérations liées aux aspects environnementaux des travaux, services ou fournitures objets du marché.
Les clauses du marché précisent les conditions d'exécution des prestations, qui doivent être liées à son objet.
Les conditions d'exécution peuvent prendre en compte des considérations relatives à l'économie, à l'innovation, à l'environnement, au domaine social, à l'emploi ou à la lutte contre les discriminations ».

Ce nouvel alinéa a ainsi vocation à imposer la prise en compte des considérations environnementales. En effet, jusque-là, il s'agissait d'une simple faculté, au même titre que la prise en compte des considérations relatives à l'économie, à l'innovation, au domaine social, à l'emploi ou à la lutte contre les discriminations. Pour autant, il ne s'agit pas d'imposer des « clauses environnementales » comme le préconisait le groupe « Produire et travailler ». Cette formule préserve ainsi la liberté contractuelle des parties et la règle générale tenant à ce que les clauses du marché soient liées à son objet.

En deuxième lieu, l'article 15 du projet de loi prévoit de remplacer la première phrase du premier alinéa de l'article L. 2152-7 du code de la commande publique, relatif au choix de l'offre économiquement la plus avantageuse. Ainsi modifié, l'article L. 2152-7 se présenterait de la manière suivante :

« Le marché est attribué au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l'offre économiquement la plus avantageuse sur la base d'un ou plusieurs critères objectifs, précis et liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution.
Le marché est attribué au soumissionnaire ou, le cas échéant, aux soumissionnaires qui ont présenté l'offre économiquement la plus avantageuse, sur la base d'un ou plusieurs critères dont l'un au moins prend en compte des caractéristiques environnementales de l'offre. Ces critères sont objectifs, précis et liés à l'objet du marché ou à ses conditions d'exécution. Les modalités d'application du présent alinéa sont prévues par voie réglementaire.
Les offres sont appréciées lot par lot.
Le lien avec l'objet du marché ou ses conditions d'exécution s'apprécie conformément aux articles L. 2112-2 à L. 2112-4 ».

L'article 15 du projet de loi introduit ainsi l'obligation de fixer, parmi les critères d'analyse des offres, un critère prenant en compte des « caractéristiques environnementales de l'offre ». Pour le reste, l'alinéa n'est pas modifié. Ce faisant, le projet de loi s'écarte des propositions assez peu réalistes de la Convention citoyenne pour le climat. Le législateur ne retient donc pas les propositions tendant à utiliser les termes d'offre « écologiquement la plus avantageuse » ou à fixer un critère environnemental comptant pour, au minimum, 20 % de la note.

La définition des critères « prenant en compte des caractéristiques environnementales » pourrait poser difficulté aux acheteurs. Néanmoins, l'article L. 2152-7 du code de la commande publique modifié en ces termes ne nous parait pas inapplicable et constitue une avancée non négligeable du droit de l'environnement dans la commande publique. A noter néanmoins que le projet de loi repousse l'entrée en vigueur de ces dispositions à un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi.

Article 23 : extension de l'obligation prévue à l'article L. 111-18-1 du code de l'urbanisme d'installer des systèmes de production d'énergie renouvelable ou des toitures végétalisées sur les surfaces commerciales et les entrepôts en abaissant le seuil de 1 000 m² à 500 m²

Afin d'atteindre les objectifs de la programmation pluriannuelle de l'énergie en évitant une consommation excessive du foncier, l'article 23, I, inséré au sein d'un chapitre IV tendant à Favoriser des énergies renouvelables pour et par tous du Titre II Produire et travailler, modifie la rédaction de l'article L. 111-18-1, II du code de l'urbanisme.

Pour mémoire, ces dispositions ont pour objet de n'autoriser les projets de nouvelles constructions soumises à autorisation d'exploitation commerciale, aux locaux à usage industriel ou artisanal, d'entrepôts, de hangars non ouverts au public faisant l'objet d'une exploitation commerciale ainsi qu'aux nouveaux parcs de stationnement couverts accessibles au public que si elles prévoient l'installation soit un procédé de production d'énergies renouvelables, soit de toitures végétalisées.

Le projet de loi étend doublement cette obligation. D'une part, il abaisse le seuil de surface, initialement fixé à 1 000 m2, à 500 m2. D'autre part, il inclut dans cette obligation les extensions de bâtiments et les constructions destinées au commerce de gros.

Le II de cet article précise toutefois que son entrée en vigueur n'interviendra qu'au 1er janvier 2024.

Article 25 : renforcement du dispositif des zones à faibles émissions mobilités

L'article 25 du projet prévoit ainsi d'étendre l'obligation d'instaurer une zone à faibles émissions mobilité avant le 31 décembre 2024 dans toutes les communes de plus de 150 000 habitants sur le territoire métropolitain. Ces communes devront être listées par arrêté interministériel qui sera mis à jour tous les 5 ans.

Une dérogation à l'obligation d'instauration d'une zone à faibles émissions mobilité pourra être accordée en raison du faible taux de population exposée aux dépassements réguliers des normes de qualité de l'air ou si des actions alternatives sont mises en place pour atteindre ces normes « dans les meilleurs délais ». Un décret viendra postérieurement préciser cette dérogation.

Au sein des zones à faibles émissions, de nouvelles obligations de prendre des mesures de police restreignant la circulation des véhicules à quatre roues conçus pour le transport de personnes et ayant un poids inférieur ou égal à 3,5 tonnes pèseront sur l'autorité compétente. Ainsi, en cas de dépassements réguliers des seuils de qualité de l'air, ces mesures devront interdire la circulation de certains véhicules déterminés en fonction de leur première date d'immatriculation. Le nombre de ces véhicules augmentera de manière graduelle entre, au plus tard, 2023 et 2025.

Cette interdiction de circulation visera aussi bien les véhicules « diesel et assimilés » (définis comme les véhicules fonctionnant au gazole et hybride gazole-électrique) que les véhicules « essence et assimilés » (définis comme les véhicules fonctionnant à l'essence et hybride essence-électrique). Les maires de communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre situé dans des agglomérations, dans des zones à faibles émissions mobilités ou dans une zone ayant reçu une dérogation l'instauration d'une telle zone devront transférer au président de l'établissement les compétences et prérogatives qu'ils détiennent en application de l'article L. 2213-4-1 du code.

Article 31 : Création d'une écotaxe par les régions.

Comme le précise l'exposé des motifs du projet de loi, cet article habilite le Gouvernement "à légiférer par ordonnance pour permettre la mise en place, d'une contribution spécifique assise sur le transport routier de marchandises :

  • par les régions disposant d'un domaine public routier et qui le souhaitent ;
  • par les départements disposant d'un domaine public routier supportant ou susceptible de supporter un report significatif de trafic en provenance des voies du domaine public régional sur lesquelles s'appliqueraient ces contributions régionales

Article 35 : interdiction de certaines liaisons aériennes intérieures

Cet article interdit, à compter du 31 octobre 2021 , l'exploitation de services aériens sur des liaisons intérieures au territoire national, dès lors qu'il existe une liaison également assurée par voie ferrée empruntant le réseau ferroviaire défini à l'article L. 2122-1 du code des transports, sans correspondance et en moins de deux heures trente. Un décret en Conseil d'Etat précisera les conditions d'aménagements de cette interdiction aux services aériens qui assurent majoritairement le transport de passagers en correspondance ou qui offrent un transport aérien majoritairement décarboné.

Article 36 : encadrement du développement des capacités aéroportuaires

L'article 36 du projet de loi interdit que soit déclarées d'utilité publique, à compter du 1er janvier 2022, les opérations de travaux et d'ouvrage ayant pour objet la création d'un nouvel aérodrome ouvert à la circulation aérienne publique ou l'extension des capacités d'accueil d'un tel aérodrome, si ces opérations conduisent à augmenter les émissions de gaz à effet de serre générées par l'activité aéroportuaire par rapport à l'année 2019.

Cette disposition a pour objectif d'encadrer le développement des capacités aéroportuaires pour les rendre compatibles avec les objectifs de lutte contre le changement climatique, mais aussi de limiter la consommation de nouvelles surfaces et l'artificialisation des sols. La loi prévoit toutefois que sont exclues de cette disposition, les opérations de travaux et d'ouvrage relatives à l'aérodrome de Nantes-Atlantique, à l'aérodrome de Bâle-Mulhouse, à une hélistation ou à un aérodrome situé dans une collectivité d'outre-mer, ainsi que celles rendues nécessaires par des raisons de sécurité, de défense nationale ou de mise aux normes réglementaire.

Un décret en Conseil d'Etat précisera les modalités d'évaluation de l'évolution des émissions de gaz à effet de serre sous l'effet combiné de la baisse des émissions de gaz à effet de serre des aéronefs, de compensation d'émissions et de l'accroissement du trafic aérien, ainsi que les modalités de prise en compte de ces évolutions dans l'analyse du bilan carbone de l'opération.

Article 37 : compensation carbone des émissions des vols intérieurs métropolitains

L'article 37 introduit les articles L. 229-55 et suivants du code de l'environnement relatifs à la « Compensation des émissions de gaz à effet de serre des vols effectués à l'intérieur du territoire national ». Le dispositif rend obligatoire pour tous les opérateurs aériens la compensation carbone des émissions des vols intérieurs métropolitains, ainsi que sur une base volontaire pour les vols depuis et vers l'outre-mer. Un calendrier progressif de mise en œuvre est appliqué, pour un début de mise en application dès le 1er janvier 2022 et une compensation de 100 % des émissions au 1er juillet 2024.

Pour s'acquitter de cette obligation de compensation, les exploitants d'aéronefs utilisent des crédits carbone issus de programmes de compensation éligibles. Afin de garantir le bénéfice environnemental de la mesure, les types de crédits carbone pouvant être utilisés seront encadrés par décret en Conseil d'Etat, et favoriseront notamment les puits de carbone et les projets soutenus en France.